GHALI CHABAB MASCARA

Article paru sur 90 minutes  de Novembre 2009 et consacré à Si el Hadj Mehkkioui

Patriarche respecté, aimé  par toute la population, et qui reste avec KHEDDIR (HOUPA), DJAKER, BACH et KADAMI un des derniers survivants de l’équipe qui a enflammé  les foules oraniennes et nord africaines Hadj MEKKIOUI, malgré les ans et la fatigue et qui garde une mémoire intacte a bien voulu m’accorder quelques instants pour me narrer la merveilleuse épopée du GCMascara des années 40 à 50.

Je me suis permis d’interrompre sa  sieste quotidienne pour qu’il me relate la chevauchée glorieuse du Gallia  dont il fut le défenseur durant les années où le club sortit de la léthargie dans laquelle l’avait plongé les autorités coloniales.

Comme pour prendre une revanche sur l’arbitraire et l’injustice dont il fut victime le GCM emmené par une constellation de joueurs allait subjuguer l’Afrique du Nord de Casablanca à Tunis  en passant  par Oran et  Alger multipliant les exploits et les prouesses face à tous les ténors.

Les octogénaires encore vivants se souviennent de cette sublime équipe  qui pratiquait un football léché résolument porté sur l’attaque et le spectacle.

Hadj MEKKIOUI ne cache pas son bonheur d’avoir eu la chance de faire partie d’un club qui a réalisé un exploit unique : celui de remporter un titre après 4 accessions successives, au terme d’un époustouflant finish avec le SCBA, et ce, grâce à l’USMO qui terrassa le Sporting sur ses terres. Le GCM devenait ainsi le seul club musulman avec l’USMO à avoir remporté un championnat.

On se délecte à l’entendre nous conter les exploits de DJAKER, SADEK « HOUPA », GAUCHER, BOUKHODMI et nous parler de ce fameux GCM- AGSM qui déclencha un flot de passion.

Hadj MEKKIOUI qui fut un défenseur sobre, élégant et impérial, un exemple de sagesse et de modestie se retrouve une seconde jeunesse et se redresse sur son lit dès l’on parle du Gallia. Et lui, le fait avec fierté et énormément d’émotion. 

MB : Si El Hadj, pouvez--vous vous présenter si cela ne dérange pas ?

Hadj Mekkioui : Oui. Je suis né à Mascara le 13 mars 1923 et je suis un vieux retraité. 
 
 

MB : Vos débuts dans le football remonte à quand ?

Hadj Mekkioui : J’ai débuté ma carrière dans les années 40 en jouant dans les équipes de jeunes de Mascara.

MB : Au GCM ?

Hadj Mekkioui : En fait, le GCM  créé a la fin des années 20 avait évolué dans les championnats officiels de la LOFA durant quelques années, puis fut mis en sommeil par l’administration qui lui avait causé beaucoup de tracasseries comme elle l’a fait pour tous les clubs musulmans. De ce fait il n’existait plus à Mascara à cette époque qu’une seule équipe l’AGSM, le club européen. Par conséquent on jouait des matchs amicaux entre les équipes des différents faubourgs de la ville ou de la région, comme TIZI, FROHA etc.….

MB : Et ensuite ?

Hadj Mekkioui : En 1945 le GCM est reparti et a réussi à obtenir l’agrément de la FFF pour pouvoir participer aux compétitions officielles. Ainsi tous les joueurs qui n’avaient pas de cadre approprié pour s’exprimer ont rejoint le Gallia dès la reprise.

MB : Et dès le départ les résultats ont suivi ?

Hadj Mekkioui : Absolument ! On a survolé les compétitions en écrasant tous nos concurrents. On a enchainé les succès et les accessions. De 1946 à 1950 on a franchi les quatre paliers aisément et la Coupe d’AFN a permis au club de se faire connaître  à travers toute l’Afrique du Nord.

MB : Et dès la première saison au sein de l’élite ce fut le titre de champion d’Omanie ?

Hadj Mekkioui : Oui cela a été l’apothéose à laquelle je n’ai pas participé en raison de mes obligations professionnelles qui m’ont éloigné de Mascara. D’ailleurs j’ai  mis un terme à ma carrière à 27 ans.

MB : Comment un petit club de Province, musulman de surcroit a t –il pu réaliser un tel exploit ?

Hadj Mekkioui : d’abord la qualité des joueurs de cette génération qui était exceptionnelle :VITALIS qui était venu de l’AGSM, KHEDIR (Ahmed HOUPA), KERROUCHE, BACH, KHITRI, et surtout DJAKER Nehari, « GAUCHER » ,LAGHA Sadek et plus tard EL GOTNI, MAHI. Il y avait des éducateurs merveilleux comme MEFLAH Aoued et Ahmed KIRRI. Et puis à la tête du club un grand Président : le Dr BENSAFIR Bêlaid. Il n’a lésiné sur aucun moyen pour aider à la marche du club qui ne vivait que grâce a lui et aux mécènes. De plus nous étions animés par une foi inébranlable en nous-mêmes ; on jouait pour le prestige pour l’amour des couleurs.

MB : Vous gardez de beaux souvenirs de cette époque…

Hadj Mekkioui : Oui mais s’il y en a bien un c’est ce match de 1948 contre l’AGSM. D’abord parce qu’il fallait le faire : éliminer un club de l’élite alors qu’on était en 4° division. Et ce match a été délocalisé ; le Sous Préfet n’ayant pas accepté qu’il se déroule à Mascara on a été contraint de le jouer à Oran a l’actuel Stade BOUAKEUL. On a été privé d’une bonne partie de note public car à l’époque se déplacer n’était pas aussi aisé. Et à la mi-temps alors qu’on menait 2-0, BENZAOUI Abdelkader est venu dans les vestiaires. Pour nous, jeunes, c’était un évènement. Il s’était déplacé de ZEMMORA. Lui, ex gloire de l’Avant-Garde, où il bâtit sa notoriété, nous a parlé durant 5 minutes, pas plus pour nous motiver et nous donner cette force nécessaire pour tenir notre résultat. Et on a tenu…….

MB : Ensuite ce fut le SAMarrakech ?

Hadj Mekkioui : Oui mais on a éliminé d’abord la grande et prestigieuse USMO et on est tombé à Marrakech après prolongations par la faute du fameux BOTTINI qui a fait un match d’anthologie.

MB : Que vous inspire le football de nos jours ?

Hadj Mekkioui : Pour ne rien cacher je n’ai plus remis les pieds  dans un Stade  depuis 50 ans. Mais je continuerai à suivre les résultats du GCM jusqu’ à la fin de mes jours car ce club je l’ai eu, je l’ai et je l’aurai toujours dans le sang et dans le cœur.

MB : Quels sont les joueurs de  votre équipe qui vous ont marqué ?

Hadj Mekkioui : C’était un bloc une équipe un tout mais GAUCHER, LAGHA Sadek DJAKER Nehari et « HOUPA » étaient fabuleux.

MB : Un dernier mot.

Hadj Mekkioui : Je souhaite que le GCM retrouve son lustre d’antan, que notre Equipe Nationale redonne de la joie à notre jeunesse et puis je ne saurai comment vous remercier d’avoir pensé a moi. En pensant à moi c’est à toute  une génération que vous rendez hommage. Il n’en reste  plus grand monde hélas, et c’est très louable de votre part.